HISTOIRE DE VENDANGE

Une saine fatigue ...
Une saine fatigue ...












Le vin rosé reste la couleur

la plus éprouvante à produire

pour un petit domaine

comme le mien.













Il faut vendanger plusieurs cépages (dont le peu de macabeu dont je dispose). Il faut gérer au mieux les 200 caisses à vendange. Il faut que le pressoir et le groupe de froid soient au top. Il faut enfin tout nettoyer tard le soir, éreintés, et charger plus d'une demi-tonne de raffles et de marc , à la main, pour les mener à la distillerie de bon matin, avant que la journée de vendange suivante ne commence. En dehors de l'équipe à la vigne - on dit la colla ici (prononcez "coye") - le personnel se compose de ... Christine et moi.


Vendredi, nous avons rentré du raisin - environ une grosse moitié - pour le rosé 2015. On l'a pressuré. On l'a encuvé et mis à débourber au froid (5° C). On a rincé les caisses (142 en tout). On a vidé le pressoir. On l'a nettoyé et on a chargé le marc (600 kg) dans le pick-up, sans aucune force motrice. Il n'y a pas de chariot élévateur chez nous (place et coût). Nous nous sommes couchés à passé minuit.

Un gramme d'acide acétylsalicylique tamponné chacun, contre les courbatures du lendemain.


Et la fille aînée de Christine a mis au monde un petit garçon à 23h33'.

Je dors avec une grand-mère à présent.


Nous devions rentrer la deuxième fournée aujourd'hui, l'ajouter au moût en train de débourber, et commencer la phase fermentaire lundi. Hélas, mon collaborateur, qui partage les vendangeurs avec moi, à dû faire face à une exigence de la coopérative où il apporte ses raisins à lui, qui lui a imposé un ultimatum: ses syrahs aujourd'hui ... ou pas du tout. Qu'à cela ne tienne, je débourberai un jour de plus et j'avais résolu de continuer (et finir) demain. 


Hélas, nos vendangeurs, des villageois à qui nous donnons la préférence depuis plus de 10 ans, ont décrété: pas le dimanche. J'ai donc désossé mon pressoir de fond en comble pour le désinfecter et je ferai deux débuts de cuvées de rosé, que j'assemblerai une fois qu'elles seront bien parties: double de travail, double de frais et - petit - risque d'arrêt fermentaire en cours de route  (population inhomogène). Dire que je suis enchanté tiendrait du mensonge.


En même temps, les vendangeurs ont travaillé 4,5 jours pour José , dont le muscat - court sur pattes - et 3/4 de journée pour moi et je peux comprendre une petite lassitude. Mais la plupart d'entre eux ne font RIEN tout le reste de l'année et nous ramassons le raisin dans des seaux, sans porteur de hotte et chacun va à son rythme. On termine les rangées (une  "yak", ici)  des retardataires ensemble, en parfaite solidarité, et c'est moi qui transvase vers les caisses, ce qui permet un contrôle visuel du raisin. Au moment du chargement dans le pick-up, c'est Christine et moi ( bientôt 116 ans à deux) qui fournissons l'essentiel de l'effort.



Je commence à comprendre le succès des Polonais auprès des collègues vignerons

ayant des exigences de rentabilité - et d'enthousiasme collaboratif -

plus élevées que les miennes.



 

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Comments: 3
  • #1

    Michel Smith (Sunday, 13 September 2015 22:11)

    Dur... Le mot "courage" est dépassé.

  • #2

    Luc Charlier (Tuesday, 15 September 2015 08:24)

    Michel, nous faisons notre métier et sortir en pleine nuit extraire des victimes en danger de carcasses en feu sur une rocade - je l'ai fait avec les pompiers dans une autre vie - est une activité au moins aussi exigeante! Eux aspergeaient tandis que je perfusais! Ce qui me déçoit est le peu d'enthousiasme des "djeuns" (mais des autres aussi) à fournir un petit effort dans un cadre professionnel "cool", alors qu'ils arrivent à des extrêmes de fatigue dans la pratique de leurs activités sportives, amoureuses, "tecno" ...

  • #3

    Denis François (Thursday, 22 October 2015 11:38)

    Chapeau !