AUX OPPOSES

Les sentinelles de M. Dervieux, et comme l'esquisse de Charlotte R.
Les sentinelles de M. Dervieux, et comme l'esquisse de Charlotte R.

 

 

 

 

 

 

Voilà un billet de blog

qui promet d'être ...

disparate,

et comme écarlate.

 

Ca vous épate? 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous avons terminé de vendanger mardi. En fait, la colla - sous un format réduit - a travaillé lundi avec nous et Christine et moi sommes allés le lendemain "ramasser" quelques derniers grains sur ce qui était la "vigne du casot", qui ne s'est jamais entièrement remise de la grêle du 16 juin 2010. Je crains bien que cette partie de la Coumo d'en Miquelets ne doive filer à l'arrachage.

 

Et il y a comme (sans jeu de mots) une tradition à Majou: nous rendons visite à Christophe Comes, justement, dès que la récolte est rentrée. Pourquoi? Parce que c'est toujours délicieux et parce qu'il a été mon tout premier client dans les P.O., sorti d'Eric Planes qui m'avait d'ailleurs conseillé d'y aller. Mais Eric évolue sous d'autres cieux à présent, hélas pour les fins becs de la région. En dix ans de fréquentation de la rue Payra - ou peu s'en faut - nous n'avons connu que deux sommeliers, fait rare, et de caractère totalement différent mais avec qui Christine a accroché tout de suite: Hervé et Vivien.

 

Cela mérite un brin de développement. La première fois que j'ai mangé à la Galinette, il y avait quelqu'un d'autre au fourneau et je n'étais pas encore vigneron. C'est le sympathique Bruno Ribière, déjà moustachu lui, qui m'y avait convié. Je n'avais pas encore rencontré Christine. La fois d'après, c'était avec cette dernière et non Bruno. Et le chef était déjà Christophe, et il était déjà macaronné. Vous me suivez? En salle, il y avait Hervé et Carinne, un duo très bien huilé, couple à la ville aussi, mais nous ne l'avons appris que plus tard. Je sais c'est compliqué tout ça. La vie à la ville aussi, d'ailleurs: Hervé, parti un temps vers les Alpes, est revenu chez nous; Carinne, non. Mais tout cela ne nous regarde pas.

 

Et on a alors vu "débarquer" au tire-bouchon ... Vivien. Autre format - il est originaire de Fronton et rugbyman, de gabarit imposant - mais même passion pour le vin et même attachement à faire resplendir la cuisine du chef par ses propositions d'accord. Il venait de Pujaudran où nous avons à présent affaire à son ... successeur. Je laisse toujours choisir le vin à Vivien, en le surveillant quand même du coin de l'oeil car la carte, à l'instar de mon tailleur, est riche mais la bourse du pauvre vigneron n'est par contre pas aussi pleine que celle de la moyenne des dîneurs dans un étoilé Michelin. Et il était habitué aux nantis de Toulouse qui descendaient se lâcher chez M. Bach, en plus! Et justement, mardi soir, il m'a proposé de tâter à ce qu'a fait Chidaine en 2014. Ce millésime, tant décrié en Touraine, des Choisilles (argile et silex sur une base de tuffeau) m'a espanté: bien sûr, le joli nez de chenin bien mûr parle immédiatement mais c'est surtout le gras qui enchante. Je pense que la malo n'a pas été faite, et c'est bien ainsi car la vivacité équilibre l'ensemble.

 

Le duo de salle existe à nouveau, car Christophe est arrivé à le reconstituer en trouvant une parfaite "remplaçante" à son ancienne serveuse. On retrouve la même convivialité complice que jadis. Pourtant, eux ne sont pas un couple à la ville ... ou alors les chipots locaux (racontars, ragots dans le parler d'ici) ne me l'ont pas encore rapporté. De toute façon, cela ne nous regarde pas. Vous aurez compris que je suis aussi très sensible aux ambiances. On va évidemment dans un bon restaurant pour bien y manger, mieux que chez soi, mais aussi pour y passer un BON MOMENT.


Il faut à présent que j'abrège mes digressions pour vous parler un peu des assiettes. La Galinette a adopté depuis une bonne année - je crois - la formule du menu unique. Il devrait y avoir huit services (voir note de bas de page). En fait, mardi dernier, il y avait dix plats. Je vous rassure, nous sommes sortis sans la faim au ventre mais pas "fart" (pleins, remplis). J'ai même croqué du pain. Tout était délicieux mais le pompon revient à un rouget de roche saupoudré d'un salpicon d'encornets, accompagné de lamelles de fenouilles et de "jus de bouille". Le désarrêtage des poissons est toujours impeccable ici, et les deux filets se faisant intimement face, encore reliés à la nageoire caudale, donnent l'impression d'avoir toujours été dans cette disposition, même dans l'eau. Pourtant, c'est la saveur de l'ensemble qui est remarquable, plus que le dressage de l'assiette. Lorsque le chef est passé nous dire un petit bonjour en fin de service, je l'ai complimenté sur ce plat en particulier et il m'a dit: "Oui, je crois que j'ai acheté du bon rouget". Il avait l'oeil qui pétillait. 


Merci à tous pour ce moment de gastronomie.


Disparate, mon blog?

Certes.


On ne peut trouver plus différent que le Montlouis évoqué ci-dessus et les deux bouteilles de mon illustration. Elles ont accompagné nos viandes tout au long de la semaine. Le millésime 1987 était, euh, difficile dans la vallée du Rhône. J'ai rencontré Albert Dervieux à deux ou trois reprises, souffrant d'arthrose mais néanmoins prompt à grimper sur l'échelle pour prélever un échantillon à la bonde. Il était le président du cru (depuis les années '50) et a pris sa retraite en 1990, laissant l'exploitation des vignes à son gendre. Il y avait trois cuvées, en tout cas, celles que nous avons pu acheter: la Garde, provenant de la Côte Blonde, assemblée à un peu de viognier et gardée très longtemps (trop longtemps parfois ?) dans du vieux bois; Fontgent, de la Côte Brune et surtout le jus des plus vieilles vignes appelées la Viaillère, un vin généralement solide, tannique, acide et un peu austère, mais qui me plaît bien.


Comme d'habitude, un vin de cette âge change au débouchage. Fontgent 1987 a repris une belle couleur après un traitement "de choc". je l'ai décanté et ensuite secoué comme un vieux prunier dans une carafe, puis remis en bouteille et agité comme un malade, avant de le remettre en carafe. Le nez n'a jamais été net, même si la trame tannique fut parfaite sur une petite araignée simplement poêlée. Au bout d'une heure d'aération, le léger moisi est devenu franchement du "bouchonné". Nous n'avons pas terminé la bouteille.

Par contre, la Viaillère 1987 fut une révélation. Christine m'a dit d'emblée: "de la syrah dans du vieux bois". Et elle avait raison. Mais au fil du temps, le côté un peu "renfermé, poussiéreux" a laissé ressortir le fruit (après 28 ans !) et surtout, un réel gras nous a empli la bouche. Beau vin, sans aucune contestation possible.


Il est doux, parfois, de redevenir l'amateur de vin et de bonne chère

que j'étais il y a 15 ans, en oubliant le costume du vigneron.

Si j'étais riche, je crois que je deviendrais gastronome.

 

 

Note: pour mes amis qui me viennent en aide, pour mon banquier qui ne le fait que rarement, pour mon frère qui me soutient, pour ma mère qui s'angoisse, je précise que la Galinette offre ce menu à ses clients (tous, pas par faveur pour moi) pour 48 euros! Vous n'avez pas une pareillade de poissons sortis tout droit du congélateur, avec son aioli en pot à l'huile de palme pour ce prix-là, sur la côté. 


Write a comment

Comments: 0