UN LIEN LOCO-TYPOLOGIQUE

Le "Grote Markt" de Veurne (Furnes), un jour de marché
Le "Grote Markt" de Veurne (Furnes), un jour de marché

 

 

 

 

 

 

 

Plus je vis en France,

plus je me sens flamand.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Strictement parlant, ce n'est pas tout à fait exact, sans être pourtant une imposture. On s'exprimait certes en français chez moi, mais avec une ouverture importante sur les langues germaniques, et j'en parle correctement trois. J'ai fait mes études supérieures - on appelle comme ça le fait d'ingurgiter par coeur de grandes quantités de savoir et (parfois) utiliser un peu de son intelligence - à la Vrije Universiteit Brussel et la mère de mes fils est d'origine gantoise. Eux deux ont d'ailleurs fait toutes leurs études en néerlandais et ont évolué largement dans la communauté flamande: école, sports, culture, musique, sexualité, hashish, bière ... la vie, quoi!

 

De caractère, je suis un Bourguignon flandrien excessivement expressionniste: extraverti, désinhibé, bon vivant, râleur, obstiné et dur à la peine. Mon manque de finesse de surface, spontané en partie, est soigneusement entretenu par coquetterie et me sert d'armure.

 

Je crois que vous en avez l'explication sous les yeux.

 

Ma mère, dont ma chevelure atteste sans contestation possible la légitimité, est née à Koksijde (Coxyde), une station balnéaire de la côte belge non loin d'Ostende, patrie du chanteur Arno et de grands peintres de tout le début du 20ème siècle.

 

C'est le Dr Barbier qui l'a mise au monde. Il habitait dans la Ooststraat de Veurne (Furnes), la première maison à gauche après le porche monumental en quittant la place. C'est maintenant le siège d'un photographe. La maison est à présent sans aucun cachet: elle a souffert durant les deux guerres mondiales, comme le reste de Furnes qui fut bombardée tant et tant de fois. La plupart des édifices ont été reconstruits.

 

Le père Barbier, un saint homme fumant le cigare et aimant la bonne chère, prenait à onze heures son apéro sur la place. Pour le reste, il travaillait avec acharnement. Son fils aîné, Fabrice, fut professeur de médecine (gastro-entérologie je crois) à l'université de Gand et dirigea la société flamande de médecine interne et son jury. Son fils cadet, Marnix, était pédiatre et devint mon parrain, après que les deux familles eussent renoncé à ce qu'ils devînt ... le compagnon de ma mère. Ce n'était pas du goût de celle-ci et ... she always has her own way. Nous disons: "Zij doet altijd haar goesting". 

 

Et Papa Barbier était proche des peintres: Constant Permeke, James Ensor, Paul Delvaux. Comment voulez-vous, avec de tels modèles, que je ne sois pas de type EXPRESSIONNISTE. Presque tout l'art flamand l'est, n'en déplaise à Jacques Brel qui a écrit de belles chansons mais dont la flamandophobie reste le point faible, tant en tant qu'homme que dans son oeuvre.

 

Je n'ai aucune anecdote sur l'Anglo-ostendais du milieu, mais bien sur les artistes qui le sandwichent.

Un Permeke, très sombre comme tous ses tableaux, et monumental, pendait dans le salon chez mon parrain, situé non loin de l'hôpital d'Ixelles où il dirigeait le département de pédiatrie. C'était un homme doux et un bon médecin. Alors que la famille avait passé quelque jours à St Idesbald, village voisin dans le Bachten de Kupe, ils trouvèrent le tableau tout délavé à leur retour. La femme de ménage portugaise l'avait nettoyé à la Javel! Le montant de la restauration fut en conséquence de la valeur de l'oeuvre!

 

Et un des fils de la famille s'était cassé la jambe au cours d'une chute de mobylette. J'étais chez eux en visite lorsque Paul Delvaux lui-même vint prendre des nouvelles de l'accidenté. Au feutre, il a ensuite esquissé un buste de jeune femme sur les bandes de gypse, en commençant par l'extérieur du trait de sorte qu'on n'a deviné le résultat que tout à la fin. Inutile de préciser que le plâtre fut enlevé avec soin après consolidation de la fracture, et conservé comme une relique.

 

J'accompagnais Christine sur la place de Furnes mercredi de la semaine dernière, et nous invitâmes ma mère à venir partager des croquettes aux crevettes - très bonnes - dans un des petits restaurants qui étalent leurs terrasses du Grote Markt au Appelmarkt. Le glacier et confiseur Verdonck, légende vivante de la Flandre Occidentale, y tient aussi boutique. 

 

Je garderai toujours une photo de la jolie place de Furnes près de moi.

Comme le disait l'employé de banque au client qui me précédait en lui tendant une quittance à conserver:

"Hou da by"!* 

 

 

 

*: "houdt dat bij", conservez-le

 

 

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Comments: 2
  • #1

    Michel (Thursday, 08 December 2016 17:56)

    Mo vent toch!

  • #2

    marcD (Friday, 09 December 2016 10:27)

    Es-tu certain? Même si Brel n'était pas un modèle de critique ojectif, d'après lui, les Flamands sont taiseux et mangent leur soupe en faisant slurp.